Ce 17 août 2024… après 26 ans d’écritures, de lectures, de rencontres et l’annonce officielle il y a quelques mois… j’ai eu le grand honneur d’être médaillé Chevalier des Arts et des Lettres par ma tante et marraine, elle-même médaillée de l’Ordre National du Mérite.
Au début, tout au début, lorsque j’avais vingt ans, je ne savais rien du métier d’auteur.
Qu’il soit de littérature adulte, de jeunesse, pour tous les âges. Ça ne faisait pas parti des métiers que j’imaginais « pour plus tard ». C’est pâtissier que j’aurais aimé !
Alors, quel lieu plus approprié que le salon de thé/pâtisseries, Le Caméo, nouvellement ouvert par ma plus grande fille, Mathilde, à Rochefort et qui fait la part belle au cinéma et à la littérature pour la remise de cette distinction.
Un moment d’émotions si fortes… entouré de ma famille et de quelques ami.e.s de plein été… que le discours de celle qui sera pour les présent.e.s et pour toujours : « tata Chantal »… a réuni d’une envolée superbe.
Parce que oui, cela fait 26 ans que je suis bel et bien auteur.
Pendant longtemps, je n’ai pas verbalisé que je créais.
Véritablement, ce sont les enfants, les ados, les lectrices et lecteurs rencontrés qui m’ont fait prendre conscience que les mots étaient ce que j’avais trouvé de mieux pour m’exprimer entièrement. Frontalement ou en me cachant, ils sont à la fois mes remparts, mes refuges et mes étendards.
Écrire, est ma manière de regarder… d’écouter… d’être au plus près de la poésie des autres pour imaginer la mienne. Et comme tout et à n’importe quel moment peut faire entrer en création, je veux être réactif à l’idée, je ne veux pas bouder ma curiosité. Toutes les questions que je me pose sont mes meilleurs déclics, les plus grands moteurs pour me pousser à dire. Dans ce sens, la vie de tous les jours m’aide beaucoup. La famille est aussi un sujet inépuisable pour le meilleur, le drôle, le sensible et pour ses drames. L’écriture des émotions est le fil conducteur de toute mon écriture.
Pour beaucoup écrire s’apprend en écrivant mais je crois encore apprendre à écrire en « rencontrant ». Écrire n’a jamais été pour moi être en ermitage. Lorsque j’écris, je ne suis jamais hors la vie. Et nous avons cette chance-là de croiser des gens qui savent le partage des mots. Parce que nos livres n’existent pas. Nos mots ne servent à rien tant que quelqu’un ne s’en empare pas.
J’ai fait de ma passion des mots un métier « multiple » qui passe par autant de manières de l’appréhender que de moyen pour transmettre ce en quoi je crois. La lecture à voix haute, le texte vivant est aujourd’hui ma grande activité de création.
Lire à voix haute est une suite logique de mon écriture qui l’est déjà… à voix haute. J’ai besoin, au moment d’écrire, de dire tout haut. Pour le rythme des phrases, la musicalité, l’impact. J’ai été élevé à ça… les histoires enregistrées, les intonations, les silences, les quand vous entendrez la clochette, tournez la page…
Lire à haute voix est un vrai moment partagé. On ne lit pas de la même manière un polar et un album, un conte et un dialogue de cours d’école. Lire ne va pas de soi, c’est un vrai apprentissage, et je vois bien la difficulté qu’ont beaucoup d’enfants et d’ados à lire. Je veux dire lire entre les lignes, pas simplement déchiffrer. C’est justement ce qu’offre la littérature : les silences, la subtilité. Et c’est une évidence que lire à haute voix ouvre des portes insoupçonnées à des oreilles qui n’auraient jamais lu ces textes-là.
Nous l’éprouvons avec les ami.e.s Cathy Ytak et Gilles Abier depuis longtemps avec notre Atelier du Trio.
Et c’est dans ce même sens que j’ai crée ma compagnie « Les Voix de Poche » pour accompagner sur scène mes textes de papier ou ceux imaginés avec d’autres. Le premier grand projet de la compagnie arrive bientôt, en octobre 2024… ce sera « Rien de grave » écrit et joué avec Gilles Abier !
Alors cette distinction était bien plus que la mienne. Elle est celle de notre littérature jeunesse, adolescente… notre littérature, tout court. Chacune et chacun sur les routes depuis longtemps, nous savons l’importance de la transmission. Celle des questions posées entre nos lignes, au cœur de nos images. Celle qui fait rêver et puis qui bouscule, qui engage, pour ouvrir à toute humanité. Et je suis chanceux que le garçon que j’aime se soit dit que cela valait mes pages de poésies, mes années de mots, de sourires, de larmes, d’engagements…
Mes mercis ne seront pas assez forts pour rendre ce que j’ai reçu d’amour ce week-end-là. Mais… Merci à toustes.
Crédit photos : Chloé Bénéteau
Illustration : Carole Chaix